C'est avec une grande tristesse que le Conseil d'Administration de Solidaresch Hëllef Réiserbann a le devoir de vous faire part du décès du Père Johnny ou João Geisen. C'est le jour de son 74ème anniversaire que João a été inhumé dans la ville de São Lourenço au Brésil, ville où il vivait depuis quelques mois, à proximité d'une communauté du MCP.
Il est décédé d'un cancer du poumon qui n'a été diagnostiqué que début août cette année. Ses amis du Mouvement des Communautés Populaires ont été à ses côtés, d'abord pendant son hospitalisation dans une clinique privée où il a reçu une assistance respiratoire, ensuite dans un hôpital public où le cancérologue qui le suivait a continué un traitement très récent, basé sur des données génétiques. Ce traitement a eu des effets positifs, qui ont conduit le médecin à lui proposer de poursuivre la cure à son domicile. Le MCP lui a procuré un lit hospitalier et une bonbonne d'oxygène, ainsi qu'une présence permanente de personnes dévouées qui l'ont soigné et nourri. Mais le répit n'a duré que quelques semaines et la maladie a repris une progression fatale. Voyant qu'il ne pouvait plus rien avaler le MCP l'a fait réadmettre à l'hôpital mais c'est là qu'il est décédé dans l'espace de deux ou trois jours.
João a poursuivi son engagement missionnaire au Brésil en restant toujours proche des personnes qu'il a rencontrées d'abord dans la pastorale agraire puis dans le syndicalisme paysan. Avec la migration de millions d'ouvriers agricoles vers les villes suite à la mécanisation de la culture de la canne à sucre, les luttes se sont transformées de manière à chercher des solutions d'organisation et de survie dans les villes. C'est ainsi que le mouvement qui a continué de soutenir les syndicats de paysans en quête de terres, via des occupations de terres abandonnées, a commencé à imaginer les différents piliers à construire pour permettre l'existence de communautés populaires aussi bien à la campagne que dans les villes. Les communautés ont créé des emplois, des crèches et des écoles, pour les petits, des activités éducatives et culturelles pour les adolescents et même des formations professionnelles en collaboration avec diverses institutions privées.
Grâce aux voyages réguliers de João au Grand-Duché, le MCP a pu bénéficier d'une chaîne de solidarité internationale qui réunit aujourd'hui plusieurs générations de militants et plusieurs organisations, tant brésiliennes que luxembourgeoises. SHR, ASTM et Guides et scouts de Luxembourg coopèrent entre eux et sont attentifs à continuer le travail entrepris depuis longtemps. A l'occasion de l'audit que le Ministère de la Coopération a commandé cette année à des experts, il est apparu clairement que l'enjeu concerne les droits fondamentaux des personnes, à l'éducation, à la santé, au travail, en somme à une vie digne dans une société juste. Le travail n'est pas fini, car les carences du gouvernement brésilien sont grandes, mais le chantier est devenu un lieu d'échanges et d'amitiés qui apporte à tous de la joie et aux membres des communautés un renforcement de leur stratégie solidaire.
Le rôle de João dans le mouvement a été celui d'un membre à part entière, qui s'est consacré à diverses tâches de coordination, y compris des transports, mais depuis la fondation du journal « Voz das Comunidades » il en a été un animateur et un rédacteur régulier. Son travail pastoral a été discret, dans la mesure où les communautés sont clairement oecuméniques, la religion de leurs membres n'étant pas une contrainte collective mais un choix privé. Catholiques, protestants, animistes et autres se côtoient donc sans difficulté, mais l'important est la fraternité et le respect des valeurs de solidarité et de démocratie. Nul doute cependant que le témoignage de João était celui d'un chrétien et d'un prêtre engagé.
Nous admirons la passion qui a animé João, ses convictions aux côtés de ses amis comme lui engagés totalement dans ce combat, pour la dignité et la construction – sur le long terme – d'une société plus juste et plus humaine. Il reste pour nous un exemple incomparable ; l'affection que ses amis lui ont témoignée en particulier au cours de cette terrible maladie, en dit long sur les sentiments profonds que son engagement sans faille a suscité. Son respect pour toutes les personnes et son attention pour toutes les situations difficiles lui ont valu une confiance et un dévouement réciproque admirable. Parfois, pendant ses visites au Grand-Duché, nous avions un peu de mal à suivre les explications qu'il nous donnait, concernant le fonctionnement des communautés populaires. Mais lors des visites que divers membres des ONG SHR, ASTM, Guide et Scouts de Luxembourg ont pu faire sur place, au Brésil, dans diverses villes et villages, toutes ses explications sont devenues claires car la solidarité était évidente et les réalisations parlantes.
Le message de João c'est son exemple, de mise en pratique de ses convictions généreuses